Dans les couloirs du pouvoir, on ose à peine prononcer son nom, symbole ultime de l’influence financière qui pèse sur les décisions politiques dans le monde, mais aussi en France. BlackRock, cette entité colossale pesant quasiment 9000 milliards de dollars d’encours, s’immisce dans les débats houleux à l’assemblée nationale au sujet de la réforme des retraites.
Alors que le pays risque d’être totalement bloqué avec la grève contre la réforme des retraites, l’influence des lobbys se pose une nouvelle fois. Avec un âge de départ à 64 ans et un système par capitalisation qui pointe le bout de son nez, Blackrock ne serait-il pas le grand gagnant de cette réforme ?
Retraite par capitalisation : Blackrock la préconise depuis 2019
C’est à l’occasion d’un mouvement social contre la réforme des retraites que la question de la collusion entre BlackRock et les plus hautes sphères de l’État est apparue. Depuis, les citoyens se demandent avec une inquiétude grandissante si les intérêts des grandes firmes financières ne prévalent pas sur l’intérêt général et sur une sujet aussi primordiale que les retraites. Le géant américain est excrément proche des gouvernements mondiaux et la France n’y échappe pas.
Blackrock à l’Elysée : (trop) proche du pouvoir ?
Le lobbying est une pratique courante dans l’industrie de la finance, au même titre que la santé, l’agriculture… Mais il soulève des questions éthiques et politiques importantes, notamment sur l’influence qu’il peut exercer sur les décisions des gouvernements et des institutions financières.
L’empreinte de BlackRock sur le monde politique est déjà très visible depuis des années. Reçu comme des chefs d’Etats à l’Elysée, les dirigeants du fond d’investissement, notamment le DG Larry Fink en chef d’orchestre, représentent le capitalisme américain poussé à l’extreme, avec ses sphères d’influences aussi puissantes qu’un pays du G20.
…et du gouvernement français ?
Blackrock fait l’objet de nombreuses interrogations quant à son influence sur le gouvernement français. Si rien ne permet d’affirmer avec certitude que le groupe est à l’origine de la réforme actuelle, il est indéniable que ses représentants ont multiplié les rencontres avec les membres du gouvernement et les personnalités influentes de la sphère politique française ces dernières années, plus particulièrement chez les Républicains et dans la Macronie.
Des liens très étroits !
La filiale française de BlackRock était autrefois dirigée par Jean-François Cirelli, ancien conseiller économique de Jacques Chirac. En 2013 il déclarait alors que « les retraites, c’est un thème clé pour BlackRock« . En 2017, il appelait à « renforcer l’idée auprès des autorités publiques qu’il faut investir pour la retraite dans les marchés de capitaux« . Est-ce que ce système de capitalisation était bénéfique pour les français ? La question n’était même pas soulevée…
L’idée de mettre la retraite des français dans les marchés financiers rejoint celle du groupe BlackRock dans son ensemble, qui se réjouit de la création de nouveaux plans d’épargne retraite individuels et collectifs par la loi Pacte, adoptée en avril 2019, qui renforce les systèmes de retraite par capitalisation. Emmanuel Macron, par la main d’Edouard Philipe, remettra à l’ancien directeur France de Blackrock la légion d’honneur quelques années plus tard…
Un rapport de Blackrock en faveur du système de capitalisation
En 2019, la firme américaine publiait un rapport dans lequel elle pressait le gouvernement français de développer un « troisième système » des régimes de retraite, à savoir la capitalisation. Le Covid étant passé par là, la reforme des retraite sera reportée dans l’agenda. McKinsey aura pris le relais dans le monde du lobbying pour vendre ses services de consulting et coûter énormément d’argent aux contribuables français.
Mais rassurez-vous, le rapport de Blackrock sur le système de retraite par capitalisation n’est pas perdu à l’Elysée. Un document établit par une entité privée, qui a été lu avec la plus grande attention par nos dirigeants politiques ces derniers mois. Comme les rapports de McKinsey, les politiques français se soumettent volontiers aux préconisations, pour ne pas dire aux désirs, des grandes entreprises américaines.
La Loi Pacte
La loi Pacte, portée par le ministre Bruno Le Maire et adoptée le en avril 2019, a ouvert de nouvelles perspectives pour l’industrie de la gestion d’actifs. Elle crée de nouveaux plans d’épargne retraite individuels et collectifs, offrant une flexibilité de gestion jusqu’alors impossibles a effectuer.
Le texte insiste notamment sur la simplicité et la flexibilité des plans d’épargne retraite. Ils permettent de définir librement le montant des versements, leur fréquence et leur durée. Le système par répartitions commencent déjà à perdre de sa splendeur, même si les éléments de langages des politiques diront qu’ils sont complémentaires. Le document de Blackrock souligne également la fiscalité avantageuse de ces plans, ainsi que la possibilité de transférer son épargne d’un plan à l’autre, sans perdre les avantages fiscaux acquis.
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Réforme des retraites : Blackrock grand gagnant ?
La retraite par capitalisation donne à Blackrock de nouvelles opportunités en France. Un marché de la retraite, à l’image des fonds de pensions américains, qui profite à l’entreprise depuis des années dans le monde. Le système des fonds de pensions américains rapporte des milliards chaque année et Blackrock a su profiter de cette tendance de la capitalisation des retraites pour développer son empire. Et il ne compte pas s’arrêter là.
L’age de départ à 64 ans bénéficie aussi à Blackrock
Mais BlackRock ne milite pas uniquement pour la réforme des retraites pour son probable système de capitalisation. L’âge avancé à 64 ans permettra au groupe de gagner de l’argent indirectement. Blackrock a investit énormément dans les société françaises du CAC 40. On peut citer Axa, Bouygues, Total, la Société Générale, Renault ou encore la BNP Paribas. BlackRock est ainsi devenu un bénéficiaire majeur des dividendes versés par les entreprises du CAC 40 chaque année, dégageant ainsi des profits importants au détriment de l’investissement, des salaires et des cotisations sociales, dont la retraite…
Avec cette réforme, non seulement Blackrock pourra proposer des services financiers via le système de retraite par capitalisation, mais il continuera d’engranger d’énormes dividendes via ses investissements dans les sociétés cotées françaises au détriment des salariés. D’une pierre deux coups donc.
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Pourquoi Blackrock rêve d’un système de retraite par capitalisation ?
Les retraites, c’est la poule aux oeufs d’or, des milliards qui passent des employés actifs aux retraités avec le système actuel de répartition. Mais le système de retraite par capitalisation profiterait énormément au fond d’investissement comme Blackrock, de part son principe. Le voici :
C’est quoi la retraite par capitalisation ?
C’est très simple : chacun épargne pour sa propre retraite. Les cotisations des actifs sont alors investies dans des produits financiers et immobiliers (et Blackrock propose bien évidemment ce service) et leur rendement dépend de l’évolution des marchés.
Cette formule de retraite permet de constituer un capital qui sera reversé au moment de la retraite, sous forme de rente viagère ou de capital. Mais si une crise financière arrive comme en 2009, c’est alors au petit bonheur la chance. En d’autres termes, il s’agissait de confier une partie de l’assurance retraite des Français à des sociétés financières privées. BlackRock allait même jusqu’à proposer une obligation d’épargne retraite dans les entreprises, en plus des régimes de base et des complémentaires.
La problématique des lobbies
Aujourd’hui, alors que le monde se remet lentement de la pandémie et subit la guerre en Ukraine, les questions soulevées par l’influence de BlackRock restent d’actualité. Les citoyens se demandent à juste titre si les décisions qui sont prises en leur nom sont réellement dans leur intérêt ou si elles sont dictées par les grandes firmes financières.
On pense bien évidemment à la période de la pandémie de Covid19… Et désormais à la réforme des retraites. Il est essentiel que les gouvernements fassent preuve de transparence et d’indépendance dans leurs prises de décision, afin que les citoyens puissent avoir confiance en leur avenir et en celui de leur pays. Sinon, ils ne pourront plus se plaindre que la France dérive vers les extrêmes…
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Fabien, 34 ans, né en Lorraine. Diplômé d’un Master Politiques Publiques à Sciences-Po. Traite l’actualité sociale au sens large. Je ne rate aucun débat politique depuis 2002.
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